L’histoire des écuries Devos, c’est celle d’une véritable success-story dont le seul moteur est la passion. Avec un parcours singulièrement différent de ceux auxquels nous sommes habitués dans la compétition équestre, Pieter Devos a su s’imposer comme l’un des meilleurs cavaliers au monde avec patience mais persévérance. Portrait d’un homme simple, amoureux de la nature, d’un cavalier talentueux, pour lequel le bien-être des chevaux passe avant tout. 

MOTS : VANESSA SCHMITZ-GRUCKER
PHOTOS : WHITE CAT PHOTOGRAPHY

Quand on est enfant et qu’on ne vient pas d’une famille immergée dans la compétition équestre, est-ce qu’on peut imaginer avoir le potentiel d’un champion ? 

J’ai commencé à monter à cheval très jeune mais uniquement pour le plaisir. Mes parents avaient des chevaux pour leurs hobbies : ils ont toujours eu un autre métier à côté, donc, en effet, je ne suis pas à proprement parler d’une famille de chevaux. Toutefois, avec mon frère, très jeune déjà, nous avons eu des poneys et j’ai fait mes premières compétitions dès l’âge de 13 ans. Quand j’ai intégré l’équipe nationale en junior et que je suis devenu champion de Belgique parmi les jeunes cavaliers, j’ai compris que j’avais un peu de talent mais je n’ai pas pensé, dès le début, atteindre un jour le Top 10 mondial. 

Alors comment entre-t-on à la 7e place du Top 10 mondial ?

J’ai toujours rêvé de faire ce que je fais aujourd’hui. Or, quand tu fais un sport, n’importe lequel, quand tu es passionné par quelque chose, tu espères toujours arriver au plus haut niveau possible. Mais, pour être tout à fait honnête, je ne pensais pas en faire mon métier. J’ai même commencé très tôt à travailler dans la compagnie de mes parents. Finalement, à côté, la compétition équestre marchait vraiment pas mal, tellement bien en fait, que j’ai intégré l’équipe nationale belge senior à 20 ans. C’est seulement là que j’ai réalisé que je pouvais faire une carrière dans le sport équestre. Pour autant, il y a encore 5 ans, je n’aurais simplement pas pensé être dans le Top 10 mondial un jour. J’aime aller toujours plus haut et me dépasser, c’est important pour réussir, je crois. 

Vous mentionnez votre travail dans l’entreprise familiale, le groupe Devos. Ce sont deux activités complémentaires, voire similaires avec le monde équestre ?

Nous faisons de la production et commercialisation de pommes et de poires. Et si les deux métiers fonctionnent en parallèle pour moi, c’est parce que, oui, ils sont très proches. Sinon, ça ne marcherait pas. Ce sont deux mondes différents mais la façon de travailler est la même. Ce qui est fascinant dans les deux métiers, c’est le rapport à la terre et à la nature. 

Cette proximité avec la nature, c’est aussi selon vous la spécificité des écuries Devos ?

Oui, notre marque de fabrique, c’est d’avoir des chevaux heureux et avec un bon mental. Pour ça,  il faut bien comprendre que le métier du cheval, c’est avant tout un métier avec la nature. Il faut toujours faire ce qui est le mieux pour le cheval. C’est tout un art de trouver la meilleure combinaison entre le haut niveau et le respect du vivant. Le plus important, c’est de garder son cheval confortable et de s’adapter à lui.

Comment définiriez-vous la relation homme-cheval ?

Je cherche chez mon cheval son meilleur talent pour le mettre en valeur. L’homme doit révéler le cheval, mettre en place un système gagnant-gagnant dans lequel le cheval est heureux pour que l’homme puisse en tirer le meilleur en retour. C’est pour ça que je n’ai pas un seul et unique système mais un système pour chaque cheval : c’est à l’homme de s’adapter au cheval et non l’inverse. 

Qu’est-ce qui vous attire chez un cheval ?

Je n’ai jamais eu de sponsors pour apporter à mon écurie des chevaux onéreux ni même tout prêts. J’ai donc dû trouver des chevaux avec un potentiel et m’adapter à eux, les former pour les amener au top niveau. L’important, c’est qu’ils aient un bon mental et qu’ils soient équilibrés. 

Si vous n’étiez pas cavalier, vous seriez….

Un homme de business. Je suis un entrepreneur. Même au sein de ma société, j’aime arriver au plus haut niveau. J’essaye toujours de m’améliorer, de m’agrandir, de faire mieux. C’est aussi ça le lien entre le haut niveau sportif et l’entreprise. 

Vous êtes actuellement à Doha pour le Longines Global Champions Tour. Que pouvez-vous nous en dire jusque-là ?

C’est le premier concours extérieur pour moi cette année, j’ai donc pris mon cheval de tête, Claire Z. Elle a très bien sauté malgré une faute. Globalement c’était bien, elle doit juste se remettre dans le bain. J’espère que cette semaine, elle sera prête pour faire un bon résultat. Ceci dit, c’est valable pour moi aussi, je dois également me remettre dedans. C’est un circuit très important, j’aimerais qu’on soit les meilleurs possible. 

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Comment préparez-vous vos chevaux aux voyages et à la compétition ?

Claire Z a eu deux mois et demi de repos début décembre. Cette année sera chargée pour elle, et pour que les chevaux gardent un mental frais, il faut un bon break. Elle est reposée, elle doit désormais pas mal travailler. Pour nous, les cavaliers, c’est différent. Quand un cheval se repose, on continue de travailler avec un autre. C’est donc 48 semaines sur 52 de concours 5 étoiles, soit au plus haut niveau, sans break. Et il faut être au top chaque semaine. Ce n’est pas toujours évident. 

Les Jeux de Tokyo, c’est déjà dans un coin de votre tête ou c’est encore trop tôt pour y penser ?

Bien que nous n’ayons pas encore la sélection définitive, c’est déjà dans la tête. S’il y a une grande chance que nous y allions avec Claire Z, ce n’est jamais acquis d’avance. Quand on travaille avec un animal, on ne peut jamais savoir : le cheval peut se blesser ou ne pas être en forme. Mais oui, j’espère y participer et je pense que Claire Z est prête également parce qu’elle m’a permis de gagner le Championnat d’Europe l’an passé. D’ailleurs, le break de deux mois et demi, c’était aussi parce que j’avais Tokyo en tête.

Quel est votre plus beau souvenir équestre ?

Je n’ai pas un beau souvenir en particulier, ce dont je suis fier, c’est d’être arrivé au plus haut niveau sans avoir un grand sponsor. J’ai fait ça avec ma famille, avec ma femme et mes propres chevaux. C’est ce que je retiens : j’y suis arrivé avec une super équipe et des chevaux qui me donnent tout. Ceci dit, le Grand Prix du CSIO5* de Calgary en 2013 ou même le Championnat d’Europe l’an passé sont des moments très forts. 

Avez-vous encore un rêve à réaliser ?

D’une manière générale, je cherche encore et toujours à aller plus loin. Évidemment, participer aux jeux de Tokyo et y faire un bon résultat, c’est dans ma bucket list.