Thomas De Bruyne
Créatif grand angle
Mots : Barbara Wesoly
Photos : Cafeine
Sous le patronyme de Cafeine, hérité de ses années de DJ, Thomas De Bruyne s’affirme comme une référence de la photographie architecturale et d’intérieur. Point de rencontre de l’espace et du graphisme, autour de compositions d’inspiration picturale. Rencontre avec ce photographe plébiscité par les plus grands architectes, designers et entreprises de décoration, tant en Belgique qu’à l’étranger.
Nathalie Deboel, Nicolas Schuybroeck, Simon de Burbure ou Hélène Van Marcke, pour n’en citer que quelques-uns… Vous travaillez avec les plus grands noms du design et de la décoration d’intérieur. Comment sélectionnez-vous vos collaborations ? Il est important que nous partagions une même sensibilité et une vision esthétique. Sur un shooting, je fonctionne de manière intuitive, percevant l’impulsion et l’atmosphère des lieux et comprenant à l’instinct ce qui fonctionnera ou non, sans m’imposer de règles ou de limitations. Mes clients me laissent toute latitude et c’est cette confiance mais aussi ce goût commun qui en assure la réussite. J’ai la chance aujourd’hui, après plus de 15 ans de pratique, de pouvoir me concentrer uniquement sur les projets qui me passionnent vraiment.
A titre personnel, à quel type d’architecture va votre préférence ? étonnement assez éclectique, mais possédant une base très minimaliste. Comme des plafonds noirs ou bruns foncés, un sol en béton. Il y a un an, j’ai fait construire un pavillon pour mon bureau, il reflète parfaitement ce qu’est mon style personnel. On y trouve des livres, des disques, des bouteilles de whisky, du café, des céramiques et des oeuvres d’art. Les objets qui m’inspirent viennent se greffer sur socle épuré et graphique. Ce sont les détails qui complètent un lieu, qui leur donnent une histoire. C’est aussi pourquoi je préfère les meubles vintages aux pièces neuves.
Sur Instagram, vous partagez également des images de votre maison. Celle-ci est-elle aussi un terrain de jeu créatif ? Oui, certainement, même si cela reste en parallèle un espace familial. Son aménagement est, dans une certaine mesure, comparable à celui de mon bureau. L’intérieur est noir et blanc, ce qui peut sembler froid ou dur, mais les meubles, tapis, tabourets et tables, sans parler des affaires des enfants, viennent ajouter de la vie.
L’oeuvre d’un photographe en particulier vous émeut-elle ? Celle de Luigi Ghirri, un artiste italien ayant réalisé des milliers de clichés dans les années 70 et 80. J’ai découvert une rétrospective de son travail à Paris et depuis, je suis amoureux de ses photos. Mais plus encore, c’est le peintre Koen van den Broeck qui fait office de véritable inspiration pour moi. Certaines de mes compositions sont presque des miroirs de ses tableaux. Mon approche est totalement différente de la sienne. Il convoque l’art et moi la réalité, mais cela ne nous empêche pas d’avoir de multiples lieux communs.
Vous signez la couverture d’“In Focus”, un livre d’hommage aux meilleurs photographes d’architecture et d’intérieur au monde. Est-ce à vos yeux l’illustration du succès ? Arriver à convaincre l’éditeur d’opter pour ce cliché en couverture a été un sacré défi, notamment par sa composition, son cadrage et sa couleur qui lui donnent presque l’apparence d’un projet en 2D. Mais je trouvais justement passionnant d’introduire un livre d’architecture avec une photo loin d’un habituel intérieur clair et élégant, qui ferait l’unanimité. Avec une image qu’il faut observer pleinement pour la comprendre. C’était une forme de pari artistique aussi. Et c’est bien sûr un honneur que de figurer sur une dizaine de ses pages d’un tel ouvrage.
Vous lanciez Caféine, votre studio, en 2007. Qu’est-ce qui vous permet de préserver et nourrir votre passion pour la photographie après toutes ces années ? En demeurant curieux. J’ai ma propre signature mais je suis constamment en recherche d’amélioration de l’éclairage, des ombres, des finitions, des couleurs. Au début de ma carrière, je ne prenais que des clichés en noir et blanc. Mais j’ai totalement abandonné ce principe ces sept dernières années. J’expérimente énormément, notamment en post-production. Je suis passionné par la technique. Encore un aspect issu de mon identité de graphiste. Et je suis convaincu qu’il est essentiel de créer son propre style, mais plus encore de le développer et de l’alimenter.
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