On ira toutes et tous à la Villa Lorraine by Yves Mattagne
Mots : Servane Calmant
Photos : DR
Fini le guindé, adieu l’institution à papa, vive la cool attitude. Les enfants Litvine réinventent La Villa Lorraine et le chef doublement étoilé Yves Mattagne (ex Sea Grill) monte au créneau en lançant une ère nouvelle. Le message délivré par la Villa new style est on ne peut plus clair : la séduction d’une nouvelle génération de gastronomes passera par un lounge bar à l’esprit résolument décontracté. De quoi déconcerter les habitués ? Non ! Côté resto, les plats signatures du chef étoilé exaltent cette Villa autoproclamée 2.0. C’est dire si l’institution va de l’avant tout en assurant ses arrières. La démarche s’avère intelligente ; le rendez-vous, séduisant.
Après un an de travaux, il reste une seule trace du passé glorieux de la Villa Lorraine : l’ancienne verrière marquée du sceau de Marcel Kreusch, son créateur en 1953. A la demande de Serge Litvine, actuel propriétaire des lieux, le bureau d’architectes A3 Development (déjà à l’origine de la Villa Emily) a fait table rase de l’ancien, pour créer une toute nouvelle Villa « dépoussiérée » et désormais agencée en deux atmosphères distinctes mais pas contradictoires pour autant, l’élégance restant le trait d’union entre les deux entités.
Explications. Après le vestiaire, on découvre un coin lounge à la lumière tamisée avec un grand bar frontal digne des plus beaux palaces. C’est ici qu’ Yves Mattagne invite à savourer sa food-sharing, des plats à partager entre convives et à commander au fur et à mesure. « Cette nourriture axée sur le partage m’a été inspirée de mes nombreux voyages à travers le monde, et m’a motivé à lancer Art Club (le pop up gourmand qu’il a ouvert en 2020 place Royale, nda) », nous glisse à l’oreille le chef, avant de s’étonner : « vous avez préféré vous installer dans la partie restaurant ? »
Eh oui, même si la nouvelle offre est bien tentante, comment résister aux plats signatures du chef doublement étoilé ? On découvre donc la partie resto rythmée par plusieurs salons et vinothèques oversize ouvertes aux yeux des amateurs. L’espace est aéré, baigné de zénitude de rose poudré et de doré. Ambiance arborée – faire rentrer la nature à l’intérieur, la toute belle idée – et mood arty avec des tableaux réalisés par le plasticien belge Stefan de Jaeger.
De l’étoilé Sea Grill fermé à jamais, Yves Mattagne a emmené avec lui Fabrice D’Hulster, son directeur de salle, sa brigade et ses maîtres d’hôtel en costume (certains l’accompagnent depuis 30 ans !) ; les jeunes commis affichent quant à eux un look plus cool, baskets blanches et bretelles pour une élégance urbaine. Côté resto donc, on choisit une des formules menu (soit les plats emblématiques du chef, soit les plats inspirés de ses voyages) ou à la carte, sachant que le midi, la cuisine continue à proposer un business-lunch.
Que du bonheur évidemment à la lecture des incontournables ! Que dire de la langoustine royale cuite sur galet et flambée au vieux saké, avec foie gras et consommé de canard laqué, gyoza en accompagnement ? A ce stade de perfection, on déguste, on savoure, on se tait. Puis on applaudit. Vient ensuite la presse à homard actionnée par deux maîtres d’hôtel, qui sert notamment à préparer devant le client une savoureuse béarnaise de homard, laquelle accompagne un homard bleu ou un turbo rôti à l’arête découpé en salle. Le spectacle est convivial, l’assiette royale. A l’attention des gourmets qui font souvent l’impasse sur les desserts car trop copieux, trop sucrés, trop ceci et cela, qu’ils se laissent tenter par la coque de meringue rhubarbe et fenouil, un amour de craquage, une délicate leçon d’équilibre entre les saveurs, un régal de subtilité.
Une ère nouvelle s’ouvre pour La Villa, qui s’affiche plus moderne, élégante et charismatique, au diapason finalement de la cuisine d’ Yves Mattagne et de son attachante personnalité. Et c’est cette parfaite harmonie entre un lieu, un homme, une équipe, qui devrait convaincre le client 2.0 sans (trop) bousculer les inconditionnels de la tradition.
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