OZARK HENRY
« Il faut savoir vivre avec nos imperfections »
OZARK HENRY
« Il faut savoir vivre avec nos imperfections »Mots : JASON VANHERREWEGGE
Photos : LUKAS DESMET
Huit ans après son dernier opus, le Courtraisien de 55 ans Piet Goddaer, alias Ozark Henry, revient avec un dixième album intitulé « August Parker ». Une invitation pour tous, enjolivée par un son immersif, à investir davantage dans son empathie dans un monde qui tend de plus en plus vers l’intelligence artificielle.
Près de trente ans après vos débuts, appréhendez-vous encore la sortie d’un disque ? Je ne cherche pas à convaincre mais plutôt à partager avec le public. Personne n’a le devoir d’écouter. J’ai hâte d’avoir les réactions car c’est pour moi ma meilleure œuvre.
En quoi se distingue-t-elle des autres ? C’est une histoire d’expérience, de maturité et en même temps j’ai encore le même sentiment que pour mon tout premier album. Je sais que j’ai 55 ans mais je me sens très jeune quand je fais de la musique. Je suis très proche de l’esprit que j’avais quand j’avais 18 ans et j’ai en parallèle la maturité qui accompagne mon âge. C’est une richesse.
Si vous gardez le nom de scène Ozark Henry, un nouveau personnage fait son apparition : August Parker. Pourquoi avoir créé un nouvel alter ego ? Je rassure tout le monde : je suis toujours le même ! (rires). Le fait d’avoir un nom d’artiste était surtout à la base quelque chose de pratique car mon nom Piet Goddaer est difficile à prononcer dans les autres langues. Quand j’ai participé au projet avec l’Orchestre National de Belgique en 2015 (un enregistrement stupéfiant dans lequel il interprète ses plus belles compositions de concert avec l’ONB, NDA), je suis tombé dans un monde que je ne connaissais pas. Celui du son immersif. J’ai alors voulu explorer davantage les rouages techniques et émotionnels de cette technologie. J’ai vite compris que c’était le format le plus naturel pour moi. À ce moment-là, comme c’était un autre monde et que j’étais un pionnier dans le secteur, j’ai décidé de me donner le nom d’August Parker à chaque fois que je travaillerai désormais dans la 3D. Je me suis toutefois rendu compte que ce personnage était finalement très proche d’Ozark Henry.
Votre album transmet des ondes particulièrement positives. Dans « Dancer in the night », vous évoquez le fait de « faire la paix avec nos cicatrices » en les acceptant et en ne formant qu’un avec comme dans le Kintsugi, une méthode de réparation japonaise. Avez- vous réussi à le faire de votre côté ? Oui. Quand on voit ce qui se passe dans le monde, c’est souvent pour cette raison que nous n’arrivons pas à vivre ensemble. Les choses ne sont pas parfaites dans la vie et nous devons savoir l’accepter. Il faut savoir vivre avec nos imperfections pour parvenir à faire preuve d’empathie envers autrui. Je ne pensais pas que nous puissions revivre une période où le fascisme prend petit à petit le pas sur la démocratie. Certaines personnes tentent de justifier l’injustifiable, comme à Gaza, en affirmant que c’est complexe mais ça ne l’est pas !
Vous vous investissez depuis longtemps dans des causes humanitaires comme en participant aux campagnes de Médecins sans frontières. Êtes- vous aussi optimiste que vous l’êtes pour vous avec le monde ? Je vis près de Ypres qui a lourdement souffert de la Première Guerre mondiale. Pourtant, aujourd’hui, c’est dur de trouver des « cicatrices » sur place. Il faut donc faire preuve de résilience et se dire qu’on peut survivre à des situations horribles.
Sans digression, revenons à votre son qui semble avoir autant d’importance que les paroles. Est-ce finalement le cas avec l’utilisation du studio Ozark Henry dans ce dixième album ? Il ne faut pas se méprendre : les paroles sont quand même la clé de voûte des chansons. Le son, lui, c’est l’image et le contexte qui les enjolive. Je considère le tout comme un film. Quand tu racontes une histoire, les dialogues sont importants mais l’ensemble doit être efficace et le son permet de créer ce monde.
En 2017, vous expliquiez de manière imagée que vous êtes devenu un sculpteur alors que vous étiez auparavant un peintre. Vous avez donc versé dans une nouvelle forme d’expression ? Effectivement. J’ai effectué cette comparaison pour expliquer le fait que faire de la 3D est tout simplement une autre manière de travailler.
Des éloges de David Bowie aux partages d’émotions professionnelles avec Toots Thielemans ou encore Moby, votre carrière a été saluée par beaucoup. Qu’est-ce qui vous motive encore aujourd’hui à faire de la musique ? Je suis persuadé que partager de la musique a du sens et augmente la qualité de vie. C’est une langue qui permet de transmettre ce que tu ne sais pas exprimer autrement. Je suis ambassadeur de « Together Stronger », un mouvement qui soutient les victimes de terrorisme, et j’ai été amené à gravir le Mont Dore en France avec des dizaines d’entre eux. Sur place, j’ai chanté pour eux et j’ai senti que ça avait de l’importance. Ils m’ont donné de la force. C’est l’une des raisons pour lesquelles je fais encore de la musique.
Instagram : ozarkhenry

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