Le Chalet de la forêt, Maison gastronomique « haute couture » accorde savamment tradition et avant-garde dans un cadre enchanteur magnifiant, de sa présence, la drève de Lorraine ! Ode à l’hédonisme et à l’excellence, le restaurant ucclois est couronné de deux étoiles au Guide Michelin.

Pascal Deavalkeneer, le Chef charismatique nous reçoit dans son petit salon pour y savourer un délicieux genmeicha.

MOTS : ARIANE DUFOURNY

Que pensez-vous de l’aphorisme d’Anthelme Brillat-Savarin, issu de Physiologie du goût « Dis-moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es » ?

Le caractère intrinsèque de l’homme fonctionne avec la manière dont il se nourrit et on perçoit les caractères se dessiner. Dans la vie sociale, la table est l’élément principal ! Les grands moments de la vie se passent autour d’une table, les premières rencontres, les fiançailles, les demandes en mariage, les dîners de famille et les dîners d’amis, parfois les séparations. Tout se passe autour d’une table ou dans un lit ! 

Dans l’histoire des sociétés, la nourriture a toujours connu des tendances, des modes. Les gros groupes nourrissent 95% voire 99%, de la population, c’est juste une énorme catastrophe ! A partir d’une prise de conscience, est-on élitiste ou pas, ou simplement réaliste par rapport à la situation, on a envie de manger beaucoup mieux, plus sainement.

On est toujours dans les excès, ce qui module tout le reste. La « malbouffe » entraîne une réaction pour justifier le « Bio », le naturel. Pour l’instant, on va éviter les grosses productions et manger moins mais manger mieux.

Je ne rentre pas dans une grande surface, j’aime bien aller chez des épiciers mais surtout chez des producteurs pour savoir qui s’est occupé d’élever mon poulet. Quand on travaille dans mon métier quatorze heures par jour, on ne supporte pas la médiocrité. On ne pourrait pas « envoyer » un poisson ou une volaille qui ne soit pas de toute noblesse.

On est ce qu’on mange, oui !  La gourmandise, le plaisir, le partage. C’est tout un sens de la vie !

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Voudriez-vous nous retracer votre parcours professionnel !

J’ai commencé des études d’ingénieur commercial à l’ICHEC et j’ai détesté. Ne sachant quoi faire, j’ai été guidé sur la voie de la restauration par mon père. Je me suis retrouvé apprenti « Chez Pierrrot » à éplucher les patates et à décortiquer les scampis. Par la suite, une amie, attachée de presse, m’a conseillé de travailler à la « Truffe Noire » qui venait d’ouvrir ; ce fut mon premier restaurant gastronomique avec brigades et postes séparés. 

Après, je suis entré au « Scholteshof » qui fut le plus beau et meilleur restaurant de Belgique. Roger Souvereyns m’a marqué dans l’esprit «  belle grande maison », avec un potager, deux étoiles au Guide Michelin. J’ai goûté au luxe et à l’excellence !

Ensuite, j’ai ouvert le « Bistrot du Mail » avec Didier Plasch. Sept ans plus tard, j’ai repris le « Chalet de la Forêt », une institution en désuétude, qui était à remettre. Après des travaux conséquents, notamment dans les cuisines qui mesurent 120 mètres carrés, j’ai ouvert le jour de mon anniversaire, le 2 décembre 1999 et on a fêté le réveillon de l’an 2000 ! Depuis, c’est comme un puzzle où je construis chaque année, j’investis. C’est un projet de vie qui se passe plutôt bien !

Plus haut dans les étoiles ! Quand vous ont-elles été décernées et que représentent-elles à vos yeux ?

La première en 2008, quatre ans plus tard la deuxième. Je n’ai jamais pensé aux étoiles, ce n’est absolument pas une obsession. Elles symbolisent le plaisir du travail, du travail bien fait !  Avoir de la créativité, de l’exigence, des magnifiques produits, c’est la base de tout ! Me rendre dans mon potager, cueillir des carottes et des radis, travailler mes produits est gratifiant ! 

Comment se porte vos ruches ? Peut-on se procurer du miel du Chalet de la Forêt ?

Mes 80.000 abeilles vont très bien, elles butinent dans mon potager et dans la Forêt de Soignes. On fait deux récoltes : le miel de printemps et le miel d’été.

Lors du projet du potager, il me semblait évident d’avoir des ruches ! Mon apiculteur récolte le miel de fleurs au printemps et le miel de châtaignier en été ; j’en ai vendu des centaines.

Les abeilles se comportent très bien en ville, au vu de la biodiversité. Les haies de lierre, présentes dans le jardin, sont mellifères ; le miel d’été doit son goût subtil aux châtaigniers de la forêt.

La cuisine est-elle un atout séduction ? 

Un homme qui cuisine pour une femme, propose une belle bouteille de vin, lui parle en préparant un risotto, va y mettre de la passion, de l’attention et transmettre de l’amour !

Même si je fais de la gastronomie, je reste un cuisinier. Mon métier, c’est cuisiner comme le verbe, transformer un produit pour en faire une recette en y mettant de l’amour. Oui, c’est séducteur !

Quelle est votre philosophie culinaire ?

Il faut que ce soit « rock & roll », sexy pour donner l’envie !

Quand j’imagine une recette, une salade de homard par exemple, je pars d’un produit. Après, je peux le proposer aussi bien avec des agrumes, des fruits ou des légumes. Si on sent qu’il n’y pas d’amour, pas de sexe dans la recette, on le voit ! 

Je dis parfois à mes commis, à mes chefs de partie : Il n’y a pas assez de sexe, c’est plat, pas relevé, pas pétillant, boring ! Il faut rendre cela sexy !

Où puisez-vous l’inspiration de vos recettes ?

Dans ma douche, dans ma voiture, la nuit, un peu tout le temps ! Il y a des moments propices, généralement lorsque je suis seul, où je fais un brainstorming en solo par rapport à un produit utilisé, une recette, en réfléchissant à comment modifier ou encore améliorer.

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« Top Chef », « MasterChef », « Le Meilleur Pâtissier » ! Que pensez-vous de la surmédiatisation de la cuisine ? 

Je regarde peu la télé, c’est difficile de juger ! Je sais qu’il y a des émissions qui sont plus ou moins bonnes où il y a des challenges et de la créativité, notamment « Top Chef ». Comme un feuilleton où l’on veut connaître la fin, les gens en sont assez addicts. Ces productions ont mis notre métier en avant mais je pense qu’on en a fait le tour !

Plus dérangeant, voire insupportable, « Tripadvisor » et les bloggers ! N’importe qui, souvent anonyme, se permet d’écrire des propos généralement faux. Il n’y a aucune culture mais seulement du jugement, des préjugés ! 

Comment voyez-vous la haute gastronomie dans les années à venir ?

C’est une question que je me pose tous les jours parce qu’on vit une époque assez compliquée. Je m’aperçois que j’ai moins de dîners d’affaires, les sociétés ayant revu leurs frais à la baisse leur permettant moins de venir dans des restaurants gastronomiques même avec des lunchs, par contre, j’ai une recrudescence de la clientèle particulière qui vient pour se faire plaisir. C’est très belge, à partir du moment où le rapport qualité est justifié, on n’a jamais de remarques sur les prix. 

On est dans le luxe, dans le haut de gamme, le sur-mesure, la haute couture, forcément on ne touche pas toute la clientèle mais, par contre, elle nous est fidèle ! On séduit de plus en plus de gens, de perpétuels nouveaux clients viennent découvrir la maison, sont surpris et reviennent.

Le Chalet de la Forêt, c’est dix-sept cuisiniers, trois pâtissiers, un boulanger, des jardiniers, trente personnes plein temps, une PME et on ne nous facilite pas la vie ! C’est une « Maison » haute couture, on a une mission éducative et il faut perdurer !

pascal-devalkeneer

LE CHALET DE LA FORET

Drève de Lorraine, 43
1180 Uccle

info@lechaletdelaforet.be
www.lechaletdelaforet.be