Travailler le local
Mots : Servane Calmant
Photo : DR
Edward Martin a les idées longues ! Le jeune brasseur lance une gamme de trois whiskies basés sur les recettes des bières de Waterloo, qu’il élabore à la ferme de Mont-Saint-Jean, au sein de la plus petite mais rutilante distillerie de Belgique …
On rencontre Edward Martin à la ferme de Mont-Saint-Jean, la plus emblématique des grandes fermes carrées située sur le champ de bataille de Waterloo, pour parler défi entrepreneurial et travail local. « Mon père, Anthony Martin, a racheté la ferme Mont-Saint-Jean en 2014 et a investi énormément pour qu’elle devienne un pôle d’attraction touristique de premier plan. » Pour l’heure, le site accueille un musée, un magasin, une salle événementielle, un restaurant (en travaux). Une micro-brasserie et une nano-distillerie, aussi !
« Tout est allé très vite pour moi ! J’ai travaillé d’arrache-pied, 12 heures par jour, pour remplacer le maître brasseur qui souffrait d’une rupture du talon d’Achille – j’ai longtemps hésité à accepter le poste, mais il y a des opportunités qu’on ne peut pas refuser ! J’ai ensuite brassé de la Waterloo en quantité en prévision du Bicentenaire de la bataille de Waterloo en 2015, puis relancé en plein cœur de Bruges la Bourgogne des Flandres qui avait disparu … Et, de retour à Waterloo, on m’a fait comprendre qu’il ne fallait jamais se reposer sur ses lauriers ! » Ce niveau de pression aurait pu déstabiliser Edward. Au contraire, le plus jeune fils d’Anthony Martin bouillonne d’idées qui vont rencontrer les rêves du paternel de produire un alcool noble. « Un soir, j’ai parlé à mon père de l’idée de distiller notre propre whisky. Sa réponse m’a littéralement boosté : je serais honoré que mon fils relève ce challenge ! … »
En 2017, Edward Martin s’en va rejoindre la prestigieuse école d’Heriot-Watt, à Édimbourg, avec comme unique objectif de pouvoir produire les alcools de ses aïeuls. « J’ai d’abord lancé le gin : distillé et aussitôt vendu, donc directement rentable. Le whisky en revanche, nécessite de vieillir au minimum 3 ans afin de pouvoir y apposer légalement l’appellation whisky. Heureusement, on avait le projet brassicole pour soutenir financièrement le projet distillerie … »
La tradition brassicole
La fierté du clan Martin, la brasserie ! « Quand on me demande mon métier, je réponds brasseur, je suis la 4e génération d’une famille de brasseurs. » Pas étonnant dès lors de voir Edward faire perdurer la tradition brassicole du groupe à travers son whisky.
« C’est notre savoir-faire de brasseur, le grain comme matière première, et le terroir, qui créent l’identité de nos whiskies. La Waterloo Récolte a servi de base à notre gin et à notre Whisky Single Grain. Notre Whisky Single Malt s’inspire quant à lui de notre Waterloo Triple, une base composée à 100% d’orge maltée. Par ailleurs, tous nos whiskies sont issus d’une levure maison qui leur confère des esters fruités. » Pour les céréales, Edward recourt à l’orge maltée belge de Dinguemans et les champs autour de la ferme de Mont-Saint-Jean apportent tout naturellement le froment. « Nous avons comme vocation de travailler le local, comme on le fait déjà avec nos bières de Waterloo de la ferme de Mont-Saint-Jean ! »
« Nous vendons une expérience de vie »
Les trois whiskies (The Brancardier, The Nurse & The Surgeon, références à la Bataille de Waterloo et à la ferme de Mont-Saint-Jean qui faisait office d’hôpital de campagne pour les Britanniques) ont été distillés et vieillis durant plus de trois ans au sein des caves historiques des Chevaliers de Malte de la ferme de Mont-Saint-Jean. S’agissant de la plus petite distillerie de Belgique, la quantité de bouteilles produite sera limitée et seuls quelques connaisseurs privilégiés en auront l’exclusivité. « Ne connaissant pas encore notre mystérieuse part des anges, il nous est impossible de communiquer le nombre exact de bouteilles qui sera produit mais nous espérons tout de même commercialiser un peu plus de 1.000 bouteilles de 50cl à 46% vol. »
Bien que la production soit amenée à évoluer avec le temps, il ne sera jamais question de commercialiser le Waterloo Whisky en quantité. Les spiritueux – gin compris – resteront donc avant tout destinés aux petits commerces et aux maisons de bouche. L’objectif étant de faire venir les amateurs de whisky sur le site de Waterloo… « Nous ne vendons pas un whisky, nous proposons une expérience aux passionnés. Lorsqu’ils viennent acheter une bouteille, ils découvrent notre univers : la ferme, les champs, la brasserie, la distillerie, le musée, la salle des chais, ainsi que notre brasseur et moi-même qui serons toujours là pour les accueillir, » conclut avec enthousiasme, Edward Martin.
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