Du costume sombre au sweatshirt multicolore, la garde-robe de ces messieurs en a fait du chemin. Entre silhouettes archétypées et pièces audacieuses, Masculinities revient sur l’évolution du style masculin de ces deux cents dernières années.

Quand on parle de l’évolution de la mode, on pense souvent à des robes ornées de perles type Charleston, des bibis colorés, des chemises à volants style victorien… Bref une cascade de tulle, de franges et de dentelle de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Mais résumer la mode au dressing féminin, c’est exclure 50% de la population. C’est la raison pour laquelle le Musée Mode & Dentelle a décidé de mettre sous le feu des projecteurs les looks masculins les plus marquants de ces dernières décennies. L’exposition temporaire, baptisée Masculinities, sonne presque comme une révolution puisqu’il s’agit de la première expo belge consacrée à la garde-robe masculine. À travers des pièces devenues cultes comme le costume, le perfecto en cuir ou encore les sneakers, Masculinities retrace l’évolution de la notion de masculinité au fil du temps et déconstruit l’image archétypale de l’homme dans la mode.

L’expo se divise en trois parties. La première établit les fondements de la mode masculine post Révolution française. Elle présente les piliers du dressing de « l’homme convenable » (traduisez chic et classique) qui exprime sa réussite à travers l’emblématique costume foncé agrémenté d’accessoires dits respectables comme la cravate, la canne ou les boutons de manchette. Exit broderies, soies et couleurs chatoyantes dignes du faste de Versailles, l’homme tourne le dos à la mode dès la fin du 18e siècle, un schisme vestimentaire appelé « la Grande Renonciation ». Cette première partie revient aussi sur des « mini-révolutions » qui ont titillé les hommes. Des pièces inspirées du dressing des militaires, pirates, motards ou marins, comme le bomber, le blouson en cuir et la marinière qui ont tant inspiré les designers. Un beau résumé du combat « homme convenable » vs « intrépides » qui a divisé le monde de la mode .

À chaque étage, l’audace monte d’un cran. Ainsi, la deuxième partie est consacrée aux « éléments perturbateurs », des designers audacieux qui ont tenté de briser les tabous en introduisant des pièces associées à la mode féminine à leurs collections. Si la femme a conquis le dressing de l’homme en s’appropriant son costume, son pantalon et certains de ces accessoires, force est de constater que l’homme demeure timoré à l’idée de copier le style féminin. Jupe, transparence, couleurs vives ou dentelle, l’expo démontre comment Jean-Paul Gaultier, Hedi Slimane, Raf Simons et les talentueux étudiants de La Cambre ont réformé, avec brio, le dressing de l’homme et déconstruit l’image patriarcale du mâle bodybuildé au profit d’un masculin plus fragile inspiré de l’adolescent torturé.

On arrive enfin au deuxième et dernier étage qui défend l’ultime stade de la mode : le vestiaire « au-delà du genre » soit l’avènement des collections unisexes. Une mutation qui a démarré dans les années 60 avec des précurseurs comme Pierre Cardin qui trouve aujourd’hui écho dans les collections contemporaines de Mosaert ou l’inspiration streetswear de Virgil Abloh.

Avec Masculinities, le Musée Mode & Dentelle nous dresse un superbe résumé des styles masculins à travers cent pièces de designers internationaux et de talents locaux tout en nous questionnant sur l’évolution (discrète mais toujours plus rapide) de la mode. Et si, à l’avenir, nous unissions nos dressings pour le meilleur et le pire ?


Masculinities au Musée Mode & Dentelle, rue de la violette 12, 1000 Bruxelles. Du 28 août 2020 au 13 juin 2021, du mardi au dimanche de 10h à 17h.