Architecte d’intérieur, artiste, designer, cinéaste. On lui doit le Jam, un hôtel unique, urbain et vivant à son image. Oubliez Pinterest, si vous lui soumettez des idées pour un projet. Son but sera de créer la confrontation et de contempler votre émotion devant son faux puzzle !
Lionel Jadot en adjectifs : libre, honnête, autodidacte, énergique, éclectique, atypique, anticonformiste, hyper créatif, amusant, passionnant, convaincant !
| Par Ariane Dufourny |
Son inspiration…
J’ai besoin d’une ambiance un peu chaotique autour de moi qui me permet d’être inspiré. Je prends des chemins de traverse, je m’évade. Je pratique la pensée latérale et je casse les codes. Ca m’amuse !
J’essaye de créer des collisions entre des choses qui ne vont pas spécialement ensemble. Ce qui m’intéresse, c’est le moment où elles sont en collision et d’imaginer la jonction.
Je n’ai pas envie de réfléchir de manière conventionnelle, en ligne droite. Un projet, je peux le commencer de façon aléatoire en imaginant dessiner une poignée de porte or, que j’ai 2.000 m2 à réaliser. J’ai un côté très scénario, je fais du storytelling !
Sixième génération des Vanhamme, société belge de fauteuils de luxe créée en 1895…
J’ai eu la chance d’être élevé par des parents qui baignaient dans l’artisanat depuis plusieurs générations. Très tôt, ils m’ont ouvert les yeux sur un style, une matière, une couleur. Ils m’ont insufflé le don d’émerveillement pour de petits détails.
Autodidacte…
Je suis « né » dans un atelier. Mes parents m’ont laissé jouer avec ce qui traînait par terre. A l’âge de six ans, j’ai fabriqué mon premier tabouret avec des bouts de bois.
Très jeune, j’ai repris l’atelier familial de fabrication de sièges. J’ai appris ce qu’on n’apprend pas à l’école: l’écoute de celui qui vient vous voir et de ce qu’il veut faire chez lui. Il faut l’écouter, il faut l’entendre. J’ai très vite compris que je n’irais pas dans son sens ! Ce qui m’amuse, c’est de créer quelque chose à laquelle il n’a pas pensé.
“ IL N’Y A PAS DEUX PROJETS QUI SE RESSEMBLENT ET C’EST ÇA QUI EST DRÔLE, SINON JE M’ENNUIE. ON NE REFERA JAMAIS UN DEUXIÈME JAM !
Convaincant…
Je jette une idée folle sur la table ! Avec mon équipe, on réfléchit, on trouve des options, des solutions pour que ça cadre dans un budget, dans une logique.
J’imagine des collisions et des jonctions jamais réalisées. Forcément, il faut que les autres tombent aussi amoureux. Je développe beaucoup d’énergie, ce qui m’excite, pour convaincre le maître d’ouvrage mais aussi l’artisan qui va mettre son eau au moulin en réfléchissant à des solutions pour la réalisation. Le client vient me voir pour que je lui donne cette énergie là !
Ses influences …
Il y a des courants qui me provoquent, qui me titillent comme le constructivisme, les années trente dans les périodes modernistes, les proportions des périodes naissantes du XVII et XVIII siècles ou encore l’habitat troglodytique dans la forme et l’énergie qu’ils procurent.
Ce qui est intéressant c’est de créer une émotion à celui qui pousse la porte une première fois ! Un niveau de « waouh effect» qui permet d’être excité. C’est pour cela qu’on est vivant !
Son style…
Multiple ! Je suis en permanence connecté et inspiré. Je considère que je suis en apprentissage permanent et ça m’amuse. Chaque rencontre, matériau, exposition, voyage vont me nourrir et inconsciemment m’influencer.
Je déteste les puzzles ! Je préfère faire des faux puzzles avec des pièces qui ne vont pas ensemble. Je les pousse pour que ça donne quelque chose. Parfois ça ne rentre pas, ça se superpose mais c’est sympa aussi.
Honnête…
Je ne veux surtout pas venir coller un décor. J’essaye plutôt de gratter et de voir ce que les murs vont raconter. J’aime « stripper », gratter, retrouver des vielles couches de plafonnage. Ca permet d’être dans du vrai et du réel !
Je ne travaille pas avec ce qu’on propose dans les catalogues. Ca m’insupporte ! Je préfère collaborer avec des artisans, faire du détournement, du recyclage.
Sur le fil rouge…
Un fil rouge qui n’en est pas un ! Je n’ai pas besoin que les choses aillent ensemble. Le cerveau est suffisamment malin chez chaque individu pour faire les liaisons entre les éléments. Je déteste quand les choses sont trop assorties.
J’imagine rencontrer la personne qui vit dans un projet que j’ai réalisé, mais je ne sais pas encore que c’est mon projet. Ca me permet de créer mon l rouge et de me raccrocher à certains éléments par rapport à la personnalité de cette personne, au biotope général de la maison et de ce qui l’entoure.
Ses matériaux…
J’aime visiter des ateliers, des marbreries, des menuiseries et surtout travailler les chutes, la matière brute. Plutôt que d’être simplement recyclé et de générer encore une énergie à être recyclée, je coupe la chaîne de la transformation. Ce qu’on a voulu jeter à une valeur à mes yeux et je vais pouvoir le remettre en scène !
Je travaille beaucoup avec Rotor, spécialisé dans la déconstruction intelligente, qui propose aux architectes- designers des matériaux tout de suite réutilisables (des portes, des carrelages, des sols, des faux plafonds en acier, etc.)
La matière vraie et brute, sa passion…
Ce qui m’intéresse, c’est sa propension à vieillir et à garder les traces du temps. J’aime un marbre brut de sciage mais aussi lorsqu’il a 600 ans et qu’il a été mangé. C’est la même chose avec le bois. A Assignan, j’ai réalisé tout un bâtiment (un chai) en écorce de chêne-liège venant du Portugal. On a bardé toutes les façades ce qui donne l’effet d’une grande écorce posée au milieu d’une vigne. Des matériaux comme cela, je tombe amoureux !
Offcuts ! Le recyclage…
Mon enfance a forcé mon regard par rapport aux déchets, aux éléments de découpe, les chutes de matériaux. Ce sont des matériaux potentiels que je peux réutiliser. Ca m’intéresse de leur trouver une nouvelle vie.
Anticonformiste…
Quand je prends un matériau classique, je vais toujours le regarder à l’envers. Ca m’ennuie de l’utiliser à l’endroit !
C’est devenu une seconde nature qui permet d’être destructif, pas par désir de nager à contre-courant mais parce que cela me provoque beaucoup d’énergie.
L’énergie comme moteur…
Mon métier, c’est ma passion ! C’est l’énergie qui me fait avancer. Je la canalise et je travaille de manière extrêmement calme. Je ne suis pas du tout quelqu’un qui s’énerve. Je ne perds pas de temps car je n’aime pas faire « mes devoirs » donc je préfère décider tout de suite. Je suis un mauvais élève !
“ J’AIME LES COLLISIONS, LES CHOCS VISUELS.
Hyper créatif…
J’ai une mémoire extrêmement visuelle. J’aime alimenter l’aspect rêve qui me permet de me réveiller la nuit et de noter des détails.
Ce que j’aime, je le ramasse ou je le photographie mais à un moment donné cela va revenir, sortir dans la création.
Sa philosophie …
Garder l’œil ouvert sur ce qu’il y a autour de nous !
La transmission de l’artisanat…
J’ai un projet personnel dans une usine 6.000 m2 à Zaventem où je vais réinstaller mes bureaux en juin, on y prépare 22 espaces, des ateliers qui vont être loués à des artisans de très haut niveau. L’espace commun de 800 m2 servira aux expositions.
Un 20/20, déco et fourneaux ! « Rural » By Marc Verrat, le restaurant parisien du Chef savoyard triplement étoilé en association avec le roi de la fête Benjamin Patou de Moma Group….
On a développé ce projet dans le Palais des Congrès, un bâtiment colossal. Marc souhaitait un chalet en bois. Je lui ai répondu : ta ferme a brûlé deux fois, imagine que j’ai ramassé les morceaux ainsi que ceux d’un vieil hangar dans le Sud de la France, d’un gymnase dans les pays de l’Est et d’autres un peu partout en Europe.
Colocation pour génération connectée ! Jadot + Cohabs…
Je n’ai pas voulu travailler pour eux mais avec eux. Les budgets sont différents mais cohérents. Nous créons une vie, une communauté dans des maisons où une quinzaine de personnes du monde entier, des jeunes entrepreneurs, viennent habiter et partagent des communs, cuisine et salon. Sous forme d’une application, ils peuvent s’inscrire, choisir leur chambre, recevoir un code et être accueillis par les autres habitants.
Joyau du parvis de Saint-Gilles désaffecté́ depuis 35 ans, l’Aegidium, une renaissance…
L’idée est de créer un lieu de rencontre de collectivité et de connectivité avec un Cohabs comprenant trente chambres, un restaurant confié à Damien Bouchéry, un co-working avec Silversquare.
Un nouveau projet, une nouvelle plaine de jeux…
Je n’ai pas peur de dire non à de nouveaux projets. Il faut se poser la bonne question. Etes-vous la bonne personne pour le client qui vient vous voir ? Il faut que ça passe dans les yeux, que l’aventure soit belle et choisir le projet pour que la plaine de jeux soit amusante.
Un rêve ultime…
Continuer ! J’ai beaucoup de chance, je vis de ma passion chaque jour ce qui me tient vivant.
LIONEL JADOT
Chaussée de Bruxelles, 191 3080 Tervuren
T: 02/538 05 93
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