Dans cette imposante demeure blanche en bord de Meuse, supposément attribuée à Alphonse Balat, l’architecte de Léopold II, trois chambres d’hôtes douillettes à souhait invitent à découvrir les univers de nos compatriotes Félicien Rops, Anna Boch et Alphonse Balat (qui, vous le verrez, suscite quelques interrogations sur les origines de la Villa). Visite guidée d’une adresse de caractère où les propriétaires ont fait de la convivialité envers le client, une exigence.

Muriel Charon nous reçoit chez elle, à la Villa Balat dont elle occupe le dernier étage. Nous sommes dans son salon à discuter des meubles qu’elle a chinés un peu partout en Wallonie, de la fresque du plafond qu’elle a dessinée elle-même, du canapé Togo en velours rose qu’elle vient d’acquérir et qu’on lui piquerait bien, du papier peint graphique doré, des nuances de vert, celui de 1900, celui de la Meuse aussi qui coule à nos pieds… La déco, délicieusement hétéroclite, s’inspire de la sensibilité et des ornements de l’Art nouveau, de l’élégance du style Art déco et parie sur un mix-and-match audacieux et chaleureux de couleurs. On se sent bien chez Muriel, tellement bien qu’on en oublierait l’interview…

Un peu de sérieux, on est ici pour travailler : parlons accueil et services, « deux notions essentielles dans notre métier. C’est trop facile pour un gérant de laisser la clé sous le paillasson à l’attention des clients, comme on le note trop souvent sur les plateformes de réservation en ligne ! », s’insurge Muriel qui revendique haut et fort le devoir pour les propriétaires de chambres d’hôtes de respecter un ensemble de mesures, dont la qualité de l’accueil. Des convictions, des exigences qu’elle met en pratique au quotidien : « je souhaite que les hôtes se sentent comme chez eux, qu’ils s’approprient l’endroit même ». S’approprier ce petit bijou de notre patrimoine, considéré comme l’une des plus belles maisons de Namur, c’est un plaisir voire un privilège !

 

Qui a bâti quoi ?

Alphonse Balat, l’architecte du roi Léopold II (qui a notamment construit les serres de Laeken et transformé Ciergnon en château) et mentor de Victor Horta, avait donc plutôt bon goût ! Oui, mais…  La Villa Balat a été construite en 1906, or Alphonse Balat est décédé à Ixelles en 1895. Pourquoi lui attribuer la Villa Balat alors qu’il ne l’a jamais vue ? Muriel a mené sa petite enquête et nous raconte de croustillantes historiettes qui mettent en scène les nièces de Balat et ses descendants, lesquels vécurent ici jusqu’en 1920 avant de placer la Villa en location… Des anecdotes historiques ou liées à la rénovation complète de la Villa il y a quatre ans – en 6 mois, une prouesse ! -, Muriel en a des centaines à partager.

Visite des lieux. Trois chambres occupent les étages. L’une, dédiée à Anna Boch, artiste peintre et fille de la fameuse faïencerie wallonne Boch, bénéficie de la tranquillité du jardin et d’un ensoleillement dès l’après-midi. De la fenêtre de la salle de bain, on aperçoit la Citadelle et le pont de Jambes surplombant la Meuse. « C’est la chambre la plus romantique et la plus féminine de la maison », nous glisse à l’oreille Muriel. Dans la chambre Félicien Rops, des tissus satinés, du velours et un lit capitonné rose inspirés de l’œuvre du peintre et graveur namurois ; deux gravures de Rops, « La femme au trapèze » et le célèbre « enterrement wallon » donnent tout son sens à l’hommage. La magnifique baignoire sur pied qui jouxte la chambre Rops suscite également bien des convoitises ! Le clou de la visite : la suite Alphonse Balat. Elle offre un accès direct vers la serre 1900 inchangée. Braquée sur la Meuse, elle est d’une poésie inouïe – on s’émerveille.

Aucun doute, Muriel et son mari ont mis tout leur cœur dans cette maison. Tout leur talent aussi. « Je peins depuis longtemps », nous avoue Muriel en désignant un portrait acidulé de Kirsten Dunst en Marie-Antoinette de Sofia Coppola, « et j’ai également suivi une formation en restauration de tableaux pendant trois ans ». Une sensibilité artistique alimentée de cours d’histoire de l’art ont nourri l’inspiration de Muriel dans les décorations des chambres thématiques jusqu’aux moindres détails, et jusqu’à l’extérieur des murs ! Vous avez vu la fresque ? Impossible de la rater : une peinture monumentale placée sous le signe de la nature orne depuis août dernier le mur pignon de la Villa Balat. Elle est signée Démosthène Stellas, membre du collectif namurois Drash, et s’est construite autour du style Balat et du vert pastel qui caractérise si bien l’Art nouveau. Un bon conseil : empruntez l’Enjambée ! La nouvelle passerelle cyclo-piétonne qui enjambe la Meuse pour relier le centre de Namur au centre de Jambes, offre une vue frontale sur la Villa Balat et sa remarquable fresque.


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