Thomas Detry
« J’ai envie de faire bouger les choses en Belgique »
Mots : Jason Vanherrewegge
Photo : Sarah Stier
Le PGA Tour n’a pas résisté au talent de Thomas Detry. Pour la première fois dans l’histoire du golf belge, l’un de nos fers de lance a réussi à signer un succès retentissant sur le plus prestigieux des circuits en février dernier au WM Phoenix Open. Rencontre avec ce phénomène de la petite balle blanche qui passe sa vie entre l’Amérique du Nord, Dubaï et Londres.
Même si vous avez tenu votre premier club de golf à cinq ans, vous pratiquiez d’autres sports au cours de votre enfance comme le tennis et le hockey sur gazon au Royal Leopold Club. Pourquoi est-ce important de toucher à tout et surtout de s’amuser quand on est petit ? C’est toujours un conseil que je donne aux parents. Je suis moi-même papa de deux enfants. Je vois souvent des parents qui poussent leurs enfants et qui veulent vraiment qu’ils soient à fond dans le golf uniquement alors qu’ils n’ont que 8 ans. C’est assez triste à voir. Un enfant doit se découvrir lui-même avec différents outils.
À quel moment avez-vous réalisé que vous pouviez faire de votre passion votre métier ? Assez vite ! Vers 12-13 ans, je dirais. J’adorais Tiger Woods, je regardais le golf à la télévision et j’ai eu ce rêve de devenir numéro 1 mondial. Il y a toujours le passage à l’adolescence, à l’Université, où on découvre autre chose. À un moment, je me suis demandé si je voulais vraiment taper la balle de golf toute ma vie. Mais, finalement, la passion a pris le dessus. Après l’Université, je me suis donné trois ans en me lançant en tant que pro. J’ai eu la chance de très vite bien démarrer ma carrière.
Le golf est souvent perçu comme un sport solitaire. Comment gérez-vous cette dimension sur le circuit ? J’essaye de ne jamais être seul en tournoi. Sur le parcours, il n’y a que moi et le caddie. Mais j’ai souvent mon coach qui est là. J’ai aussi un préparateur physique. J’ai ma famille, mes enfants… C’est un sport solitaire mais c’est une équipe. Quand je gagne, ça reste une victoire collective.
Comment fait-on pour résister mentalement à la pression ? Votre préparation passe notamment par la méditation. Je ne le fais pas tous les jours mais la méditation m’a fortement aidé dans certaines situations où la pression était intense. J’ai appris à maîtriser certaines techniques que je dois encore perfectionner et amélio-rer. J’ai appris à être un peu plus maître de moi-même, de mes émotions. À côté de ça, je fais également appel à un préparateur mental. C’est une Américaine avec qui je partage pas mal de choses quand je sens que j’en ai besoin.
L’aspect mental semble être plus important que le côté physique dans ce sport. Pour faire une partie de golf entre amis, il ne faut pas forcément être fit mais le pratiquer comme on le pratique nécessite de l’être. On voyage de semaine en semaine, on enchaîne de longs déplacements, on est debout tôt le matin, on est sur un parcours de golf pendant cinq voire six heures. On s’entraîne avant et parfois après. Il y a des capacités physiques importantes pour performer et ne pas se blesser comme un dos bien costaud, un cardio qui tient la route et des hanches qui sont plus fortes qu’on ne le pense.
Vous avez évolué sur les circuits européens et américains. Pourquoi avoir décidé de déménager et d’aller étudier à la base aux États-Unis ? Le sport aux États-Unis, c’est un autre monde qu’en Europe. En Europe, ça reste encore un village. Quand on voit les infrastructures que les universités ont, les moyens financiers disponibles pour nous envoyer à gauche et à droite et à quel point on est poussé… C’est un peu un passage obligé. Dans le golf, on performe encore jusqu’à 40 ans donc il y a moins cette contrainte de temps comme dans d’autres sports. On peut commencer notre carrière pro vers 22-23-24 ans.
Imaginez-vous un jour transmettre votre expérience aux jeunes golfeurs belges ? Avec toute l’expérience que j’ai acquise et avec mon nom, j’aimerais garder un pied dans le golf. Mais c’est une question difficile car je peux jouer pro au golf jusqu’à mes 50 ans ou presque. Si je me blesse ou que je ne peux plus jouer, je ne sais pas ce que je ferai. J’aime assez bien la finance, l’immobilier… J’ai un atout pour le business mais je garderai toujours un pied dans le milieu et j’ai envie de faire un peu bouger les choses en Belgique. Ça reste un petit pays et le golf n’est pas vraiment démocratisé. Le nombre de licenciés a déjà bien augmenté avec ce qu’on a fait avec Nicolas Colsaerts et Thomas Pieters. Mais il y a encore du boulot et c’est un peu un devoir de partager cette expérience en tant que sportif belge. Ça passe notamment par le fait de se montrer.
En dehors du golf, qu’est-ce qui vous anime tout particulièrement ? Je lis beaucoup, j’adore m’informer et comprendre les mouvements macro-économiques dans le monde entier. J’adore aussi toujours jouer au tennis. J’ai également une famille avec deux petites filles de deux et un an, et ça prend pas mal de temps.

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