Holemans
Centenaire d’excellence
Mots : Barbara Wesoly
Photos : Holemans
En 1922, Henri Holemans fondait l’enseigne de joaillerie éponyme. Un siècle plus tard, la maison belge perpétue la maestria et l’expertise qui lui ont donné sa renommée, sous l’égide de Moïse Mann, devenu il y a huit ans le gardien de ce précieux héritage, qu’il habille d’une touche contemporaine.
Depuis trente ans, l’histoire de Moïse Mann se conjugue à celle d’Holemans. De ses débuts dans les ateliers joailliers, en tant qu’ouvrier à la cheville, à son accession à sa tête, il évoque avec la connaissance précieuse que seule procure l’intime, la genèse et l’itinéraire de la maison.
Holemans fête cette année ses cent ans. Quel regard portez-vous sur son parcours ? « Celui d’un chemin parsemé d’embuches mais aussi d’une belle histoire. Une histoire débutée avec son fondateur, Henri Holemans, qui concevait essentiellement des objets religieux, puis ensuite transmise à son fils, Jean. Après la Seconde Guerre mondiale, celui-ci ressentit le besoin de réinventer l’entreprise et de l’amener vers son identité joaillière. Il mit sa connaissance du dessin au service de bijoux destinés à se transmettre durablement, de génération en génération. Lui succéda ensuite son propre fils, Thierry Holemans, qui porta la maison à l’international. C’est à son époque que j’ai intégré celle-ci, y travaillant durant dix-sept ans, avant de créer en 2009 ma propre maison de joaillerie, Manalys. Mais en 2013-2014, Thierry souhaitait arrêter son activité et sachant que je possédais une connaissance profonde de l’entreprise, il m’en confia les rênes. Et ce qui me poussa à accepter et à conserver l’essence de la marque, c’est de constater la fidélité nourrie par ses clients, leur profond attachement à celle-ci. »
L’histoire de la maison et notamment sa transmission familiale, est-elle, selon vous, inscrite dans ses créations ? « Oui, profondément. Dans chacun de ses aspects. Henri Holemans a ainsi suivi une formation d’un maître japonais pour maitriser les laques précieuses. Un savoir-faire qu’il légua à son fils, qui l’utilisa dans ses pièces, puis à son petit-fils. Et qui aujourd’hui encore demeure une part de l’ADN de la maison. Il en va de même pour l’excellence. Avant de reprendre Holemans, j’ai passé dix-sept ans à y œuvrer. Des années durant lesquelles j’ai vu passer chaque création. J’ai été imprégné de son style et cela m’a permis d’acquérir et de véhiculer à mon tour ses codes. De nourrir un amour du travail bien fait. Il ne s’agit pas, de prime abord d’aimer ou pas une pièce, mais de reconnaître un savoir-faire. Un savoir-faire que je souhaite à tout prix préserver. »
Comment définiriez-vous le style Holemans ? « Classique, traditionnel, mais avec une approche moderne, une recherche de touches de nouveautés. Il n’y a pas d’extravagance, mais la volonté de susciter une dose d’étonnement. »
La maison n’a pourtant pas hésité à faire preuve d’audace, notamment en étant la première enseigne belge à ouvrir une succursale sur l’iconique place Vendôme à Paris ? « Jean comme Thierry Holemans étaient des précurseurs. Et le second n’a pas hésité à prendre des risques incroyables pour développer comme pour préserver la maison. En ouvrant en effet une boutique place Vendôme, durant trois ans, avant de la revendre avec un bénéfice exponentiel. Également en me délivrant sa confiance et en me plaçant à la tête de celle-ci, alors que j’étais l’un des quatre joailliers de la maison. Mais aussi en se battant pour conserver un atelier de création en interne, au sein même de l’entreprise. Aujourd’hui, peu de boutiques en possèdent encore un. Car cela a un coût. Il faut fabriquer sans cesse, à la différence d’un atelier externe qui fonctionne à la commande, et donc payer les hommes, la matière première, les pierres et fabriquer du stock. Mais Thierry Holemans tenait à faire perdurer ce principe et le savoir qui l’accompagnait. Savoir-faire que nous continuons de pérenniser. »
Que désire inspirer la maison de joaillerie à travers ses bijoux ? Un principe de pérennité, de beauté ? « En effet, en créant des bijoux qui demain pourront être transmis en tant que véritables pièces d’héritage. Mais aussi une notion d’excellence et de minutie. Il est fondamental d’être infaillible dans notre qualité de fabrication. Je sais d’où chaque pierre de couleur provient et je peux certifier de l’éthique derrière chaque diamant, issus d’un fournisseur qui collabore avec les plus grandes maisons à l’international. Cela fait partie des principes fondamentaux de la maison, au même titre qu’un travail à l’ancienne, à la main, sans cire ni cadre, mais avec un bloc d’or qu’on lamine, étire et transforme. »
Que souhaitez-vous à Holemans pour l’avenir et pourquoi pas, pour les cent prochaines années ? « Dans mon métier, ce qui m’a toujours passionné, c’est de transmettre et partager mes connaissances en fabrication. Mon grand questionnement aujourd’hui est de savoir comment transmettre une telle maison. En préservant une continuité et un code de conduite. Une éthique. Quand on arrive ici le matin, on travaille tous à mettre le lieu et le décor en place, à passer un coup d’aspirateur. On vit ici, on y passe tellement de temps que c’est notre deuxième maison et l’on en prend soin, c’est un principe de collaboration essentiel. Il n’y a pas vraiment de hiérarchie, plutôt du compagnonnage. Des valeurs qui tombent malheureusement dans l’oubli. Je souhaite transmettre un jour Holemans à quelqu’un qui aimera profondément la marque mais aussi ses valeurs et son âme et souhaitera continuer à former d’autres talents. »
Quelle est l’essence d’un beau bijou, d’une pièce à part, selon vous ? « Pour moi, au-delà des pierres et de la conception, c’est la personne qui la porte et celle qui la crée. On peut faire des bijoux magnifiques avec un simple morceau de bois. Un beau bijou est aussi avant tout la création de quelqu’un qui l’aime. Le reflet de l’amour, que l’on insuffle dedans. »
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