De Barbara Abel, on est super fan ! On retrouve la reine du thriller belge dans « Les Fêlures » qui nous tient en haleine de la première à la dernière page. Personne n’en sortira indemne ! A quoi reconnait-on un thriller exceptionnel ? C’est celui qu’on regrette de terminer, tellement l’envie de le relire devient obsessionnelle. Plus passionnant qu’une série addictive ou qu’un date !

En 2002, « L’instinct maternel » recevait le Prix du roman policier du festival de Cognac.  20 ans d’écriture teintée de suspense, 14 thrillers psychologiques. Quelle est la recette de votre succès ?  Je suis exigeante. Je dois être ma première fan !

Vos romans, des thrillers psychologiques dans toute leur splendeur. Où trouvez-vous votre inspiration ? Dans la vie de tous les jours, évidemment (rire). Je m’inspire du quotidien, d’un fait divers, de rencontres, d’histoires qu’on me raconte. En découle une réalité crédible. 

Votre nouveau thriller s’intitule « Les Fêlures. Son élément déclencheur ? Un procès d’assises auquel j’ai assisté pour les besoins d’une série que je co-écrivais. Ce procès jugeait un homme qui s’était suicidé avec sa compagne, sauf qu’elle ne s’est jamais réveillée et que lui a survécu. Dans le roman, l’amorce est identique, mais les personnages différents. 

Êtes-vous une personne angoissée ou marquée par un passé chahuté, pour raconter des histoires aussi meurtries ? J’ai vécu des drames comme tout le monde : le divorce de mes parents, la mort de mon papa… Mais aucun drame incroyable. Je ne suis pas une angoissée, mais mon imagination conçoit très vite les catastrophes qui pourraient découler de certaines situations. J’ai une grande capacité à imaginer le pire !  

« Les Fêlures », celles de vos personnages sont profondes. Avez-vous pris conseil auprès de psychiatres ou psychologues pour les dépeindre ? Je fais beaucoup de recherches. Il y a un outil extraordinaire : Internet ! Je fais aussi appel à des professionnels. Pour « Les Fêlures », j’ai notamment contacté mon médecin traitant et un diabétologue. 

L’insuline serait-elle l’arme fatidique pour un crime parfait ? Oui ! Ce fut confirmé par ce diabétologue. Je cherchais un produit qui donne la mort et qui a la caractéristique de disparaître de l’organisme post-mortem. Une arme assez redoutable car les médecins légistes ne la détectent pas lors de l’autopsie. Des overdoses d’insuline pourraient être des meurtres jamais détectés… 

Ne craignez-vous pas de donner des idées ? Quelle horreur ! Dans la majorité des cas, le diabétologue a précisé que les gens ne mourraient pas et pouvaient être sauvés. Une personne n’est pas l’autre. J’avais besoin de gens qui meurent, alors j’ai ajouté de l’alcool et de la morphine. 

En somme, à vous lire, c’est la recette du parfait assassin ? Pour un autre bouquin, j’ai discuté avec mon garagiste. Je voulais trafiquer les freins d’une voiture pour provoquer un accident. Il m’a rétorqué : rassurez-moi, c’est bien pour un roman ? (Rires). 

Au coeur de vos romans, aucun tueur en série mais des familles dysfonctionnelles. Pourquoi les névroses familiales vous inspirent-elles autant ? Car le lecteur peut s’y identifier ! Les familles dysfonctionnelles sont plus proches de moi, de nous, qu’un tueur en série. Un psychopathe est malade, il  ne m’intéresse pas. En revanche, nos fragilités, ce qui nous blesse, nos émotions mises à nu, quel fabuleux terreau pour un roman ! 

Serions-nous tous des assassins qui s’ignorent ? Oui, heureusement la plupart d’entre nous ne passent jamais à l’acte. L’homme jugé pour le meurtre de sa maîtresse était tellement gentil que sa femme, ses enfants, ses parents, ses frères, ses sœurs, ses amis, ses voisins, ont témoigné en sa faveur…. Comment un homme qui ne ferait pas de mal à une mouche en vient à « tuer » ? C’était un suicide, il l’a tuée par amour parce qu’elle souhaitait mourir. 

Quelle est votre secret pour provoquer autant d’émotions ? Je ne raconte pas tout de la vie de mes personnages. Dans « Les Fêlures », à l’image de cet homme conduit jusqu’au banc des accusés dans ce procès d’assises, j’ai construit ce roman avec des anecdotes du passé et du présent, par petites touches. 

Votre roman « Derrière la haine » a été adapté au cinéma par le réalisateur belge Olivier Masset-Depasse en 2019. Son film, « Duelles », interprété par les actrices belges Anne Coesens et Veerle Baetens, a remporté 9 Magritte du Cinéma ! Anne Hathaway et Jessica Chastain ont repris leur rôle dans « Mother’s Instinct », le remake hollywoodien. « Le Diable s’habille en Prada » débarque dans votre univers ! Quel est votre ressenti face à un tel succès ? Quand Olivier m’a parlé de ce projet en 2018, j’ai mis l’info dans un coin de ma tête. Maintenant que je sais que le tournage a lieu du 25 mai au 4 juillet 2022… Oui, c’est fou, incroyable !